Les œuvres littéraires japonaises « hétérolingues » – qui intègrent des mots, des phrases, des extraits entiers en langue étrangère – comprennent une dimension visuelle non négligeable. Souvent, elles mêlent aux caractères japonais d’autres écritures : des sinogrammes chinois (simplifiés ou non), des hangeuls coréens ou des lettres de l’alphabet latin. Dans cet article, nous proposons de nommer ce phénomène « hétérographisme » et d’étudier son caractère esthétique : comment les écritures étrangères sont-elles intégrées, quels effets ces dispositions génèrent-elles sur le lecteur, et quelles fins ces stratégies visuelles servent-elles ? Après avoir exploré les outils méthodologiques nécessaires à l’analyse de ce procédé, nous étudierons quatre œuvres contemporaines. La comparaison permettra de démontrer que ce n’est pas tant le choix des caractères étrangers insérés que la manière dont ils sont employés qui impacte les lectures et révèle les projets littéraires de chaque auteur.