Afin de se faire une idée de la manière dont fonctionnent lecture et vision de la lettre au moyen âge, on propose ici l’analyse serrée d’un choix d’initiales dans la Bible de St. Martial (BnF, fin du XIe siècle). Les fondements de la règle d’alternance entre « couleurs » et «métaux », connue de l’héraldique, sont déjà opératoires et produisent un type d’écriture basée sur le paradigme de la «lettre-chose ». La lettre-chose n’interprète pas son support comme un écran (Anne-Marie Christin), mais plutôt comme un champ (« campus »). Le rapport au support s’élabore grâce à un usage particulier de la couleur observable uniquement sur les originaux dans un éclairage naturel, et accessible à une description fonctionnelle. On constate ainsi des règles concernant l’usage des couleurs dorée et pourpre, puis du minium, enfin des champs verts (pour l’ornementation) et bleus (pour la figuration), aboutissant à la découverte d’un effet de lecture que l’on propose ici d’appeler, littéralement, le pro-blêma.