Ce cinquième numéro de la revue écriture et image s’inscrit pour la première fois dans une dimension aréale. Il s’intéresse en effet au Japon et aux problématiques liées à son écriture. La singularité bien connue de ce système graphique, mixte dans son principe, a été maintes fois abordée, tant par les linguistes que par les historiens, les théoriciens de l’esthétique ou les sémioticiens. Anne-Marie Christin a fait de cette question l’un des points nodaux de sa réflexion, notamment dans son livre L’Image écrite ou la déraison graphique, publié chez Flammarion en 1995 (rééd. 2001, 2009). Plusieurs ouvrages collectifs du Centre d’étude de l’écriture et de l’image, parallèlement à des travaux publiés par certains de ses membres, ont été eux aussi consacrés en tout ou en partie à l’écriture japonaise.
À la fois notation de la langue et image à voir, l’écriture japonaise se construit aujourd’hui entre un héritage chinois plus que millénaire et une ouverture alphabétique récente, entre des pratiques quotidiennes profondément modifiées par le numérique et une activité calligraphique qui repose sur des outils anciens mais ne cesse de se transformer. Ce numéro rend compte de cette diversité et de la multiplicité des signes aujourd’hui en usage pour écrire au Japon, d’où l’acception plurielle d’« écritures japonaises ». Il propose des corpus nouveaux ou peu connus, choisis depuis les temps anciens jusqu’à l’époque contemporaine, et analysés à travers des approches variées mais toujours attentives au détail.
À côté des formes d’écriture les plus courantes, quels usages, notamment créatifs, non conventionnels voire disruptifs, peut-on repérer au cours de l’histoire ? Comment les codes et les contraintes ont-ils pu être, parfois, déjoués ? Quels sont les défis que pose aujourd’hui à l’écriture cette période de transition rapide et d’instabilité graphique ? Ce numéro d’écriture et image propose quelques éléments de réponse à des questions qui, in fine, échappent au cadre aréal pour traverser le monde.